BD - Histoire complète
Genre : SF
Thème : transhumanisme – monde virtuel - identité - éthique
Niveau : lycée - adulte
En 2113, Constant est un jeune homme équipé d’un implant cérébral très sophistiqué, connecté au DataBrain Center, ce qui lui a permis d’acquérir de nombreuses connaissances, sans avoir besoin de les apprendre. Il peut aussi choisir la saveur des gélules qui lui tiennent lieu d’alimentation ou vivre toutes sortes d’aventures dans des mondes virtuels… Mais seuls les plus riches bénéficient de ce type d’équipement, qui demande une énergie considérable, dont le reste de l’humanité est privée. Les autres vivent en périphérie des villes, dans ce qui semble être un grand dénuement. Un soir, un bug fait perdre la mémoire à Constant : va-t-il (re)découvrir « ce que nous sommes », sans assistance numérique ?
Derrière cette magnifique couverture, on retrouve le dessin délicat de Zep dans ses bandes dessinées plus réalistes et ses codes couleurs en bichromie : du noir et une couleur pastel qui confère à chaque scène une ambiance particulière, parfois une deuxième teinte fait le lien entre deux passages ou met en exergue un détail. Il différencie ainsi les étapes de son scénario avec fluidité, sans avoir recours à des mots de temporalité. Il varie aussi le format des vignettes (magnifique double page avec la baleine bleue du début), les angles de vue, avec des plongées…
On retombe aussi sur un univers futuriste glaçant, qui rappelle son Paris 2119, qui évoquait la téléportation et le clonage. Constant est un héros plutôt antipathique, qui finit par toucher le lecteur au fur et à mesure que sa quête l’humanise et lui permet de redécouvrir le monde et les autres à travers ses sens et sa propre intelligence…
A travers ce récit, l’auteur invite à réfléchir à des thèmes écologiques et éthiques. Comme il s’était inspiré des explications du botaniste Francis Hallé pour The End, il s’appuie ici sur ses échanges avec le professeur Pierre Magistretti, un des neuroscientifiques en charge du projet « Blue Brain », qui a pour objectif de créer un cerveau synthétique. Cette documentation préalable lui permet d’ancrer son récit dans la recherche scientifique actuelle, pour mieux extrapoler : jusqu’où le progrès scientifique peut-il aller sans qu’on y perdre notre âme, notre humanité ?
« On voulait faire un humain augmenté, on a créé l’humain assisté » résume un des personnages. Tout le récit nous interroge : à force de concevoir des outils numériques qui remplacent toutes les compétences acquises au fil du temps, n’est-on pas en train de perdre nos savoirs et savoir-faire ?
Je suis décidément très fan de toutes les bandes dessinées adultes de Zep, à proposer dans les CDI de lycée (ou pour les 3e), pour le plaisir, ou pour initier un travail autour du genre de la science fiction et des débats sur des thèmes scientifiques et éthiques.
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